Mobilités professionnelles : Agir sur les usages pour réduire les coûts d’achat
Les entreprises sont aujourd’hui bien structurées en matière de gouvernance et d’optimisation de leurs achats de mobilité. Les différents composants de leur Total Cost of Ownership (TCO) sont sous contrôle. Les coûts directs d’achat, de financement et d’installation, frais de déploiement, indirects de fonctionnement et de maintenance font l’objet d’analyses et de projections précises. Mais un facteur déterminant de la performance finale de la politique de mobilité est souvent sous-estimé voire totalement ignoré : C’est l’impact du comportement et l’usage par les salariés des services, produits ou prestations achetés par son entreprise. Ainsi, la manière dont le comportement et l’usage s’exercent peut faire varier, à la hausse comme à la baisse, une performance faciale estimée à 100 de l’ordre de 30 à 40 points. Pour la flotte: La part du TCO lié au comportement de conduite (consommation carburant, assurance, cout de remise en état, usure…) pèse jusqu’à 30% du coût total, sans tenir compte des effets induits sur l’entreprise (Accident de travail/Incapacité Temporaires de Travail, dépassement de horaires…) ou sur les collaborateurs (amendes, accidents…). Pour le voyage d’affaires: La part du TCO lié au comportement de réservation (anticipation, Online Vs. Offline, canaux de réservations ou fournisseurs non référencés …) pèse jusqu’à 40% du coût total. Avoir la bonne information n’est pas toujours suffisant pour adopter le bon comportement. A titre d’exemple plus de 80% des voyageurs d’affaires savent pertinemment qu’il faut passer par les canaux référencés de leur entreprise pour réserver leur hôtel. Et pourtant, seuls 40% d’entre eux le font. Il est possible d’inciter les individus à adopter les comportements souhaités, sans les contraindre en présentant les informations différemment et en modifiant l’environnement de choix. Et ce type de pratique fonctionne, et même très bien. Ainsi, lorsqu’il est proposé comme une alternative à l’avion le recours au train n’est retenu que par 5% des individus, alors qu’il est souscrit par 70% d’entre-eux lorsqu’il est proposé par défaut. C’est ce qu’on appelle le nudge , coup de pouce en français. Mais le nudge, c’est quoi ? La théorie du nudge part du principe qu’il y a une pensée rapide, instinctive et émotionnelle (système 1) et une pensée plus lente, réfléchie et logique (système 2). Notre cerveau est une formidable machine capable de véritables prouesses. Mais concrètement nous sommes exposés à plus de 2900 messages par jour et notre cerveau n’en retient réellement que 4. Nous avons donc évolué de sorte à traiter un maximum d’information de manière quasi-inconsciente et instinctive via le système 1. Le système 2, lui, est inconfortable et contraignant et ne sera sollicité qu’en dernier recours. Les chercheurs en Economie Comportementale ont dressé une liste de plus d’une centaine de facteurs d’influence des comportements humains qui constituent autant d’éléments qui permettent de concevoir ce que l’on appelle une « architecture de choix ». Cette dernière incite sans contrainte et pousse naturellement les individus à prendre de meilleures décisions et à adopter des comportements recherchés La finalité étant d’organiser un environnement de choix des collaborateurs en système 1. Quelques exemples de nudges appliqués aux mobilités professionnelles Un nudge doit répondre à un objectif clair ( ex :réduire l’empreinte carbone, réduire les couts liés aux pratiques de conduite, réduite l’open booking, augmenter l’autopartage….) et être directement rattaché à un biais de comportement. · Exemple 1 : objectif améliorer les conditions de trajet et de productivité d’un collaborateur Le Biais comportemental utilisé est l’aversion à la perte. Les études montrent en effet qu’une perte est 2,5 fois plus douloureuse que le gain d’un montant équivalent ne procure de joie. La formulation recommandée est la suivante : » Sur ce trajet, en prenant l’avion vous perdez deux fois plus de productivité pour une durée de déplacement identique qu’en prenant le train « · Exemple 2 : Comment développer l’usage du co-voiturage (domicile-travail) Le biais comportemental utilisé est celui de la norme sociale : les individus sont en effet influencés par ce que font les autres et ont donc tendance à caler leur comportement sur le plus grand nombre. La formulation recommandée est la suivante : « 50% des collaborateurs de votre entreprise utilisent le co-voiturage pour se rendre au bureau et ceux de votre département sont 70% à le faire « L’ensemble de ces approches est souvent doublé par une présentation « visuelle » sur les outils/applications dont l’objet est de faciliter la lecture (cases pré-remplies, binarité du choix, options par défaut …). Enfin, le nudge peut être accompagné d’autres techniques incitatives comme la gamification particulièrement efficace pour augmenter l’engagement, la motivation ou améliorer l’apprentissage. Yann Barbizet